L’état du prisonnier français

Le 8 décembre 2011

Les prisons françaises explosent. Pour comprendre, OWNI et WeDoData plongent dans le système carcéral. Une enquête graphique sur les détenus qui remplissent les cellules des prisons.

Dans l’application ci-dessus, passez le curseur sur les divers thèmes (femmes, jeunes, peines, étrangers, cellule, suicides) pour afficher les informations relatives. Cette application est tirée d’une infographie réalisée par WeDoData en partenariat avec OWNI pour le numéro 10 du mensuel Snatch, dans les kiosques samedi 10 décembre. Dans un dossier de 60 pages, le magazine s’est penché sur les prisons : rencontre avec Patrick Dils, enquête sur la perpétuité et les tatouages en milieu carcéral, tour d’horizon des alternatives (plus ou moins) surprenantes à l’étranger.


“C’est tout le système pénitentiaire qui est en sur-chauffe” se désole Alexis Saurin, président de la Fédération des Associations Réflexion-Action, Prison Et Justice (Farapej). Les prisons françaises sont pleines, surpeuplées même. Le 1er novembre 2011, 73 149 personnes étaient sous écrou en France, dont 64 711 détenus.

La différence s’explique par les condamnés à un placement sous surveillance électronique (PSE), indique Pierre Fournier, chercheur au CNRS. Cette utilisation du bracelet électronique a explosé depuis 10 ans, mais sans le suivi nécessaire, condition de son efficacité. Alexis Saurin regrette le manque d’accompagnement :

Le suivi est insuffisant sur les PSE. Sans suivi, il y a un risque de récidive.

Le PSE fait parti des dispositions visant à aménager les peines, et à diminuer la pression à l’intérieur des murs des prisons. Au même titre que la liberté conditionnelle, le bracelet électronique devait remplacer des peines d’enfermement. Le 1er novembre 2001, trois personnes étaient placées sous surveillance électronique. Elles sont 7 386 aujourd’hui. En dix ans, le nombre de PSE a crû de façon constante, avec une accélération en 2011. Les placés sous surveillance électronique représentent aujourd’hui près de 10% des personnes sous écrou (intra et extra muros).

Dans un rapport sur les conditions de détention en France, publié le 2 décembre, l’Observatoire international des prisons (OIP) s’inquiète du projet de loi de programmation sur l’exécution des peines qui “sous-tend un renoncement à l’exécution des courtes peines en milieu ouvert”.

En milieu fermé, trois personnes sur 100 sont des femmes, un est condamné à perpétuité, 18 sont des étrangers et huit ont moins de 21 ans. En creux se dessine le portrait-type d’un détenu : un homme de 36 ans, de nationalité française. La durée des peines tend à s’allonger. Majoritairement inférieures à un an dans les années 1970, elles durent cinq ans et plus dans les années 2000.

121 suicides en 2010

“On meurt dans les prisons françaises” écrivait le 25 novembre dernier Le Monde dans son éditorial. 121 personnes se sont suicidées en 2010. Dans la revue, Arpenter le Champ Pénal, Pierre Tournier détaille :

Parmi les 121 suicides sous écrou recensés, 12 se sont déroulés hors détention : six sous placement sous surveillance électronique (PSE), trois lors d’une permission de sortir ou dans le cadre d’un placement extérieur et trois à l’hôpital.

Soit 109 suicides en détention stricto sensu, précise Pierre Tournier. Parmi eux, cinq mineurs. Un chiffre “considérable” rapporté à la population des mineurs sous écrou, écrit le chercheur. L’Observatoire international des prisons relève que “la fréquence des suicides (un tous les trois jours) et le taux de mortalité par suicide (14,6 pour 10 000 placements) sont dramatiquement identiques” en 2003 et en 2010 malgré la mise en Å“uvre de programmes de prévention en 2004 et 2009.


Retrouvez notre Une sur les prisons :

Photographie de Une © Aimée Thirion

Enquête graphique (app et infographie) réalisée par We Do Data avec OWNI en partenariat avec le magazine Snatch qui consacre son dossier au prison dans son numéro 10, dans kiosques à partir de samedi 10 décembre.

OWNI avait consacré un dossier sur les alternatives à la prison en novembre 2010.


Précision : Le 1er novembre, le nombre de détenus dormant sur un matelas à même le sol était de 446, soit quatre de plus par rapport à juin 2011.

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