Et si la Loppsi censurait WikiLeaks ?

Le 15 décembre 2010

Avec l'instauration de la loi Loppsi 2, le gouvernement pourrait être tenté de faciliter le filtrage de site tels que WikiLeaks. Retour sur le sujet avec Jérémie Zimmermann.

Avec l’instauration d’un filtrage généralisé du web, les sites comme WikiLeaks pourraient passer du statut d’indésirables à inaccessibles.

Alors que la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieur (Loppsi) revient à l’Assemblée nationale ce mardi 14 décembre, l’article 4 concentre toutes les attentions. Ce dernier instaure le filtrage de sites web. Un filtrage qui pourrait être étendu aux sites gênants pour le gouvernement, tels que WikiLeaks.

La raison d’État

Dans le texte du projet de loi, il est question

[d']empêcher toute connexion à des sites à caractères pédophiles répertoriés par les services de police

Un blocage toutefois vierge de tout contrôle judiciaire.

Une fois instauré, un tel filtrage pourra sans difficulté être étendu. C’est du moins le postulat de la Quadrature du net. “Une fois que la censure du net sera dans les mains du gouvernement, elle sera élargie à d’autres domaines comme la raison d’État”, explique à OWNI le porte-parole du collectif, Jérémie Zimmermann.

Actuellement, le gouvernement se donne beaucoup de mal pour pousser WikiLeaks hors du territoire. “La France ne peut héberger des sites internet qui violent le secret des relations diplomatiques”, a plaidé le ministre de l’Économie numérique, Éric Besson, non sans être taxé de volonté de censure. A l’avenir, la Loppsi pourrait résoudre ce genre de “désagrément”…

“L’extension du filtrage est déjà prévue”

Pour l’heure, le texte de loi prévoit que l’Office de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) dresse une liste noire de sites à filtrer. Liste transmise ensuite aux fournisseurs d’accès pour blocage des sites, sans jamais passer par une autorité judiciaire.

Mais “l’extension du filtrage est déjà prévue”, avance Jérémie Zimmermann,  “notamment  pour les jeux en ligne et pour les sites de téléchargement illégaux“.

L’autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) a déjà obtenu des tribunaux que les fournisseurs d’accès empêchent les internautes d’accéder aux sites de jeux “contraires à la législation en vigueur”. Quant aux industries de la musique et du cinéma, Nicolas Sarkozy leur a promis d’“expérimenter sans délai les dispositifs de filtrage”. La société civile des producteurs phonographiques (SCPP) aurait même déjà mené plusieurs expériences de filtrage...

I’ll be your mirror

Rassurons-nous, même si un jour WikiLeaks devait être filtré, ses amis et partisans sauront tout mettre en Å“uvre pour poursuivre la diffusion de “leaks”.Outre les échanges des documents confidentiels via les réseaux peer-to-peer, les Anonymous et autres internautes engagés ont la possibilité de créer une multitude de sites dits “miroirs”. De tels sites permettent, même si le site originel est bloqué, de garder une version toujours accessible puisque abritée par des adresses différentes. Comme quoi, “le filtrage n’est jamais une solution…”, conclut Jérémie Zimmermann.

“Instaurer un filtrage du web, c’est ouvrir la porte à sa banalisation”, conclut Jérémie Zimmermann.

Le filtrage n’est jamais une solution ; le filtrage c’est de la censure

Illustrations CC FlickR par World of Good

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