Bienvenue dans l’ère de la méritocratie créative

Le 25 octobre 2010

On commence fort la semaine avec une réflexion de fond sur un sujet aussi passionnant qu'épineux: la méritocratie créative, ou comment Scott Balsky milite pour que le talent de chacun soit l'unique facteur de réussite.

Selon Scott Belsky, les plus grandes réussites sont le fruit du travail de personnes créatives et d’équipes très productives. Après l’obtention d’un MBA à Harvard Business School, il est l’auteur du bestseller “Making ideas happen” et devient fondateur et PDG de Behance. Behance est une plateforme qui réunit les meilleurs professionnels de la création pour proposer leur travaux aux plus grandes agences. Behance attire 5 Millions de visiteurs par mois et est devenue l’un des réseaux les plus efficaces pour les créatifs. Ici, Scott Belsky imagine un monde régit par le mérite et le talent…

Imaginez un monde dans lequel les meilleures idées ont les plus grandes chances d’être concrétisées. Plus de favoritisme qui attribue les projets créatifs aux mauvaises personnes. Retirez l’intermédiaire qui décide arbitrairement, et pour des raisons économiques, qui a le droit de briller peu importe son talent. Chaque individu, équipe, et industrie évoluerait dans un monde où les gens les plus talentueux bénéficieraient des opportunités les plus intéressantes.
Ce rêve, ce serait la “méritocratie créative”, et je crois que les avancées technologiques, les communautés en ligne et les plate formes qui permettent les carrières indépendantes feront très bientôt de ce rêve une réalité.

Malheureusement, nous nous battons contre des siècles de traditions bien établies. Peu sont ceux qui s’opposent à l’ascension basée sur le mérite. La plupart des industries et des sociétés dans leur ensemble sont vérolés par le manque d’efficacité, par des intermédiaires, et on crée un système qui détermine ce qu’est la qualité. C’est la triste vérité mais la qualité de vos idées et vos talents sont moins importants que votre carnet d’adresse, qui vous définit en tant que tel. Pourquoi? Parce que le système traditionnel qui nous entoure fait en sorte que cela fonctionne ainsi.

Sans méritocratie créative, on souffre parce que notre talent et nos travaux ne suffisent pas à trouver du travail. Les clients pâtissent d’une production médiocre. Plus encore, nos industries et sociétés souffrent de médiocrité.

Vous pouvez dire que c’est déprimant ou injuste, mais ne l’acceptez pas. La méritocratie créative est à notre portée. C’est notre devoir, en tant que cerveaux créatifs et leaders d’encourager une ère où capacité rime avec opportunité.

Voici quelques moyens pour initier l’ère de la méritocratie créative:

Attribution appropriée

Dans notre monde moderne, où règnent la transparence et l’accessibilité à l’information, nous devrions nous méfier des efforts fournis pour mettre en avant les talents. Les chasseurs de têtes sont connus pour mettre la main sur de forts potentiels pour ensuite envoyer des fragments de portfolios et CVs anonymes. Ils dissimulent l’identité du talent intentionnellement et réussissent à outrepasser la méritocratie. Souvent, les chasseurs de têtes utilisent les qualifications d’une personne pour appâter. Ensuite, ils proposent des candidats moins qualifiés pour profiter d’une meilleure marge.

La base de la méritocratie créative, c’est la transparence. L’accumulation d’appréciations (ou crédit) est la devise qui achète les opportunités.

L’opinion de “la masse crédible” comme levier

L’enjeu primordial sur Internet aujourd’hui, c’est d’être capable de hiérarchiser les informations des communautés. Parmis le flux infini de contenus mis en ligne par des créatifs au talent variable, le challenge numéro un consiste à discerner le bon du moins bon. Aidées par des outils comme Digg et le bouton “like” de Facebook, les communautés commencent à s’organiser. Tout, de l’article à l’oeuvre d’art, peut désormais être classé par consensus.

Avec le temps, la hiérarchisation de données prendra de plus en plus d’importance. Par exemple, pour évaluer la qualité d’un photographe, l’opinion de 1000 photographes pourrait être plus conséquente que l’avis d’un million de personnes lambda. Telle est la différence entre une masse critique et une masse crédible.

Une fois que les communautés auront développé un algorithme pour la masse crédible, la méritocratie brillera à des endroits inattendus.

La fin des CV classiques et des portfolios sans relief

Les hauts potentiels méritent une mise en avant à la hauteur de leur talent. Il est grand temps de remplacer le CV classique réalisé sous Word par quelque chose de plus interactif, crédible et interconnecté. Un CV devrait être sourcé dans le but de montrer plutôt que de dire et, ces sources devraient êtres scrupuleusement examinées. Le pouvoir des témoignages liés à un CV deviendra tout aussi important qu’une entretien d’embauche. LinkedIn donne déjà une idée de ce à quoi peut ressembler un CV interactif.

Il en va de même pour les professionnels du secteur créatif. Il faut passer du site simple et isolé à un tremplin plus interactif pour nos travaux. Votre travail est plus à même d’être découvert si vous l’exposez là où les gens sont déjà.

Les réseaux permettront aux talents de recevoir des propositions d’entreprises appropriées. Ils ne feront pas qu’accroître le nombre de connections mais les rendront qualitatives. Les clients potentiels et des milliers de blogueurs, recruteurs et passionnés profiteront de la possibilité de chercher et de trier les talents via une large palette de travaux créatifs et ce dans un seul et même endroit.

Comme certains d’entre vous doivent le savoir, nous travaillons dur pour les professionnels de la création sur notre propre plate-forme, Behance.net. La raison pour laquelle Behance intègre LinkedIn, AIGA, MTV et d’autres est d’aider les professionnels de la création à rendre visible leurs portfolios.

La méritocratie créative prospérera avec l’adoption de plateformes qui hiérarchisent les talents – comme LinkedIn et Behance Network, parmis tant d’autres.

Des plateformes communautaires mais sélectives

Les plateformes centrales pour les artistes ne progresseront que si nous les protégeons des abus. J’ai déjà écrit auparavant dans BusinessWeek et d’autres sur les promesses et les périls du crowdsourcing. Les communautés en ligne, en particulier lorsqu’elles sont organisées, sont un véritable vivier de talent. Ceci dit, quand ces technologies n’opèrent pas de sélection parmi les candidats, c’est la communauté toute entière qui en pâtit (ex: Myspace vs. Noomiz, ndt). En bref, à moins que les talents ne soient rémunérés pour leur temps, la production en souffrira.

Cette méthode n’est pas compatible avec la méritocratie car seuls les individus aux compétences médiocres ont le temps et l’envie d’y participer. Les clients obtiennent une production en-deçà du niveau escompté, pire encore, ils ne s’en rendent même pas compte. Les participants perdent vite espoir vu le peu de chances d’être rémunéré. La méritocratie créative est alimentée par les encouragements optimisés par les meilleurs talents.

Davantage de raisons de vivre de sa passion

Dans les conditions actuelles, on peut gagner beaucoup d’argent en faisant quelque chose que l’on n’aime pas. Pourquoi? Parce qu’on ne se concentre pas assez sur ce qui importe vraiment. Le recrutement, les procédés d’évaluation, et les départements de Ressources Humaine échouent à récompenser ceux qui ont un potentiel créatif et punissent ceux qui s’en tiennent au status quo. Mais tout cela changerait sous l’influence de la méritocratie créative.

Si les meilleurs talents étaient appariés aux meilleures opportunités, vous ne réussiriez jamais sans passion. Après tout, la créativité et les idées sont naturellement le résultat d’une réflexion proactive qui est, en retour, le résultat d’une passion. Quand on fait un travail qu’on aime, la méritocratie créative est le vent qui vous pousse. Je pourrais continuer à expliquer comment les institutions académiques et les 500 compagnies les plus fortunées pourraient encourager une méritocratie créative. Suffit de dire, il faut repenser le système d’évaluation, de récompense, et les principes opérationnels.

Les résistants doivent innover

Bien sûr, la méritocratie créative n’est pas valable pour tout le monde. Ceux dont le talent est médiocre auront besoin de travailler leurs compétences; ils ne pourront pu compter sur la chance pour réussir. Des industries entières, qui utilisent notre incapacité à sourcer et mesurer le talent, disparaitront. Ceux qui craignent la méritocratie créative devraient examiner le pourquoi de leur résistance et, innover.

* * *

Les meilleures idées ne verront pas le jour à moins qu’ont leur en laisse l’opportunité. Notre équipe, chez Behance s’intéresse aux conditions (dans une équipe, une communauté, l’industrie, ou la société) qui encourageraient la méritocratie créative. Par notre mission, nous encourageons les professionnels de la création à faire en sorte que les idées se concrétisent. Nous savons que la méritocratie créative est une pièce centrale du puzzle. En accord avec l’esprit méritocratique, je voulais partager ces pensées, voir où elles nous mèneraient.

Qu’en pensez-vous?

Quelle industrie bénéficierai, d’après vous, le plus d’une méritocratie créative?
Quels type d’outils ou techniques élèveraient la méritocratie créative?
Où rencontrerons-nous le plus de résistance?

Article initialement publié The 99 Percent et traduit par Lara Beswick.

Crédit Photos Flickr CC : Mela Sogono; Chuck “Caveman” Coker; Wallig

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