OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Are-Vah en hindi dans le texte http://owni.fr/2012/02/06/are-vah-areva-jaitapur-inde/ http://owni.fr/2012/02/06/are-vah-areva-jaitapur-inde/#comments Mon, 06 Feb 2012 13:40:50 +0000 Ophelia Noor et Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=94452

Le port de Sakrinate a une économie prolifique. 1er port de pêche de la région, il fait face au plateau de Jaitapur convoité pour l'installation du complexe nucléaire. © Micha Patault/Picture Tank

Le projet de centrale nucléaire d’Areva dotée de deux réacteurs EPR dans la ville de Jaïtapur, en Inde,  a poussé le photojournaliste Micha Patault à s’intéresser de plus près à la question. Son projet de documentaire, est malicieusement intitulé ARE-VAH, interjection qui signifie “oh putain” ou “oh la la” en hindi. Un reportage au long cours sous forme de road-movie, commencé en 2011 pendant la catastrophe de Fukushima. Le jeune réalisateur repart sur le terrain dans deux semaines, avec la preneuse de son Sarah Irion. Une collecte de fonds est organisée sur Kiss Kiss Bank Bank pour soutenir le son projet. Entretien.

Comment est née l’idée de ce documentaire ?

L’Inde est un terrain que j’appréhende bien, je m’y rends depuis 10 ans, je parle hindi couramment. Je l’ai étudié car je voulais connaitre cette société. J’ai travaillé ensuite sur les conséquences de l’affaire Bhopal pendant 4 ans. C’est aussi à ce moment là que je me suis rendu compte que la photographie pouvait avoir un impact, être documentaire.

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Pour un contrat de 5,7 milliards d'euros, en Inde, sur une zone sismique, Areva lance la construction de deux réacteurs ...

À mon retour, je me suis ensuite penché sur la question du nucléaire à plusieurs reprises. J’ai d’abord été aux États-Unis à Richland, ville berceau du nucléaire, où j’ai réalisé un webdocumentaire,Atomic City. Mon but était de comprendre l’origine de l’épopée nucléaire. Puis, je suis revenu vers le cas français et j’ai documenté la transition énergétique pour le compte de Greenpeace. J’ai alors imaginé une trilogie sur le nucléaire, en plongeant d’abord dans le passé comme à Atomic City, dans le présent à Jaitapur, et dans le futur.

Pourquoi faire de Jaitapur le symbole du présent nucléaire ?

C’est important de symboliser le présent par l’acte et pour moi c’est Jaitapur. Sans aucun jugement de valeur par rapport à Fukushima évidemment, car on est face à quelque chose de très grave. Mais je trouvais plus intéressant de symboliser le présent nucléaire par les décisions des états et la responsabilité des entreprises dans le cadre d’un futur projet de centrale comme à Jaitapur, plutôt que par les conséquences d’une catastrophe comme celle de Fukushima. L’idée était de prendre le contre-pied de ce désastre japonais en travaillant sur la question indienne sachant que nous, français, sommes actuellement dans cette problématique. C’est Areva, et des banques françaises comme la BNP [La BNP - entre autres - devrait prêter à l'état Indien pour l'achat des EPR, NDLR] et les contribuables français qui sont directement impliqués dans ce projet indien. Et ça rejoignait ma logique de recherche et la logique temporelle dans cette chronologie du nucléaire. Plus tard, je me consacrerai au troisième volet du futur sur les déchets nucléaires. Mais ce qui me presse aujourd’hui c’est de traiter, surtout pendant cette période d’élection présidentielle, la question du nucléaire.

Les pancartes anti-nucléaires sont confisquées par les autorités. Cinq villages doivent être évacués, mais les habitants résistent et se mobilisent. Village de Madban. ©Micha Patault/Picture Tank

Vous étiez à Jaitapur lors de la catastrophe de Fukushima. Quelles ont été les réactions des Indiens ?

Les gens en Inde sont très au fait de Fukushima. J’étais à Jaitapur quand la catastrophe est arrivée. Je me rappelle de Pradip, leader d’un petit groupe, qui m’appelle et me dit : “c’est peut-être notre chance ce drame. Ils vont abandonner le projet !” Fukushima a provoqué un énorme raz de marée médiatique en Inde. Le projet nucléaire de Jaitapur et la catastrophe de Fukushima étaient partout dans les médias. Mais il faut déjà beaucoup de force pour lutter contre son gouvernement d’état.

Vous repartez dans deux semaines, une collecte de fonds est lancée sur Kiss Kiss Bank Bank, qu’est ce qu’il vous manque pour avancer dans l’enquête ?

Pour le moment, je n’ai que des constats de faits. J’étais là-bas en mars 2011, j’ai recueilli les témoignages de plusieurs personnes, des pêcheurs, des leaders locaux, des institutionnels comme Greenpeace et l’activiste anti-nucléaire Vaishali Patil. Mais je veux aller plus loin. J’ai des questions qui demandent à être démontrées. Par exemple, si cette région est aussi sismique qu’ils le prétendent alors pourquoi le projet a-t-il été accepté ? Sur l’échelle de l’Inde, la région de Jaitapur est classée niveau 4 sur les 5 zones. Depuis la signature de l’accord avec la France, la zone a été re-classée au niveau 3. Pourquoi ? Je voudrais aller interviewer le spécialiste de cette question qui se trouve à Delhi. Côté financier et partenariats, des négociations sont en cours sur le son avec des radios. Et pour le web-documentaire, Picture Tank m’aide sur la levée de fonds et dans la recherche d’un diffuseur et d’un producteur. La collecte de fonds sur KissKissBankBank servira uniquement à financer le reportage à venir.

Quelle trame narrative avez-vous envisagée pour construire le webdocumentaire ?

Je suis d’abord parti d’un constat. À Jaitapur j’ai vécu et senti une grande pression policière. Le terrain était très compliqué, j’ai du me cacher. Je portais constamment mon topi musulman, avec ma barbe, pour me faire passer pour un local. Les gens ont peur, on le sent. Une zone entière va être dépeuplée et cinq villages vont être évacués. La pression est forte. Pour me déplacer jusque cette zone il m’a fallu prendre de gros risques. Et je sentais que j’en faisais prendre aussi aux gens qui me côtoyaient. C’est en racontant cette expérience à mon retour en France que des personnes m’ont fait réaliser que le plus intéressant était de montrer cette pression et cette peur sur place. En le vivant soi-même. Du coup, j’ai réfléchi à comment je pouvais montrer cela de manière humaine. C’est à ce moment que m’est venue l’idée du protagoniste local qui mènerait l’enquête à mes côtés sous la forme d’un road-movie à travers ces différents lieux, entre le Bhopal et Jaitapur.

Pravin Gavankar est président du Jahnit Seva Samiti, leader de la lutte anti-Jaitapur. "Les autorités répriment sévèrement notre mouvement pacifiste. J'ai fait plusieurs séjours en prison et nous sommes régulièrement menacés." Village de Madban. ©Micha Patault/Picture Tank

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce protagoniste et sur le point de vue adopté ?

Je n’ai pas l’habitude de partir en équipe et écrire me prend beaucoup de temps. Je travaillerai avec Sarah Irion qui est preneuse de son et rédactrice. La troisième personne est donc Sanjay Verma, un indien, totalement engagé dans l’histoire de Bhopal que j’ai rencontré en 2011. À la fois victime et acteur majeur, il a perdu toute sa famille dans la catastrophe de Bhopal à l’âge de trois ans. Il a 29 ans aujourd’hui, fait des études à Delhi et se trouve à la tête d’une association, Students for Bhopal. Sanjay se bat au quotidien pour faire reconnaitre les droits des indiens et la responsabilité de Dow chemicals [Anciennement Union Carbide, NDLR] dans cette catastrophe. Sanjay endosserait donc comme moi le rôle d’enquêteur sur Jaitapur. Mais ce qui m’intéresse encore plus c’est d’avoir sa vision et ses réactions à chaud après un rendez-vous ou une rencontre. Comment on montre un anachronisme de l’état, entre les décisions prises aujourd’hui et le fait qu’aucune leçon ne semble être tirée du passé. Je voudrais le montrer de façon humaine et de cette manière là, réussir à impliquer le public dans cette histoire.

Amjad Borkar, leader de la Ligue des Pêcheurs. Sakrinate. "Si ce projet se réalise, les habitants de toute la région seront obligés de fuir." © Micha Patault/Picture Tank

Justement, l’enquête se déroulera sur la route entre Bhopal et Jaitapur. Pourquoi avoir pris Bhopal comme point de départ ?

La mémoire industrielle de l’Inde c’est justement la catastrophe chimique de Bhopal. Cela fait plus de 27 ans que les victimes se battent pour obtenir une compensation plus plus juste. L’Inde a ce passé et cette conscience de la responsabilité des entreprise étrangères. C’est une question très sensible qui peut mettre le feu aux poudres très rapidement. Bhopal est une verrue pour le gouvernement indien qui cherche à privilégier ses accords économiques avec ces entreprises. Et des pays comme les États-Unis et la France veulent prendre ces marchés de centaines de milliards de dollars. C’est pour cela que Bhopal me semblait un bon point de départ. Le lien entre le passé et le présent est fondamental.

Comment allez-vous travailler sur le terrain, avec quel medium allez-vous privilégier ?

La photo est très difficile sur le terrain. Le site nucléaire de Jaitapur n’est pas encore construit. Pour l’instant c’est du papier, des accords, des signatures. Il me fallait de l’image, du concret, des faits, une dynamique. Je vais privilégier la vidéo, avec le 5D et une GoPro. Sarah aura le micro. Je ferai de mon mieux pour la photo, mais le but c’est de passer inaperçu donc je prévois aussi filmer avec l’iPhone. J’ai peur que ça tourne mal bien sûr, qu’on me confisque des affaires. Je pense idéalement y rester un mois. Le temps de me mettre dans le bain. On partira de Bhopal avec Sanjay. On va faire les choses petit à petit, en prenant le moins de risques possibles. Nous allons passer par le village de Kudankulam dans l’état du Tamil Nadu au sud de l’Inde, pour voir son complexe nucléaire russe très controversé. Mais je dois faire très attention. Je sais aussi que la police là-bas commence à avoir des droits qui sont totalement anti-démocratiques.

L'économie de la pêche est prolifique dans la région de Jaitapur. Les pêcheurs dénoncent l'impact négatif de l'exploitation de la centrale nucléaire sur l'écosystème marin. Le port de Sakrinate compte 500 bateaux. @Micha Patault/Picture Tank

Vous parlez de la tension ambiante, maintenant de pressions policières ?

Au Kudankulam, les leaders sont déjà accusés de sédition et de guerre contre l’état. Le gouvernement indien vient d’autoriser les autorités policières du Tamil Nadu à arrêter les leaders qui s’opposent au projet de centrale. Ils risquent des peines à perpétuité alors qu’ils participent à des manifestations pacifiques. C’est peut-être ce qui attend Jaitapur. Les condamnations pourraient être les mêmes. Je pense qu’il y aura beaucoup de stress et de pression sur place car la construction commence en 2012 sachant que le réacteur devra être opérationnel en 2018.

Que peut-on dire de la pression financière ?

En 2010, une limite de dédommagement en cas de catastrophe nucléaire, a été signée. En cas d’incident nucléaire majeur, il sera demandé à l’entreprise étrangère une somme de 250 millions de dollars. C’est dérisoire et humiliant. Pour point de comparaison, la catastrophe chimique de Bhopal a reçu 470 millions de dollars au total. Et cette somme était déjà insuffisante. Là nous parlons de nucléaire, c’est encore plus grave car ce type de catastrophe ne connait pas de frontières. Mais c’est pourtant acté avec le gouvernement indien : Areva sait qu’elle ne devra verser qu’une toute petite participation de 250 millions de dollars alors que le contrat initial des EPR se monte à 7 milliards de dollars. Paradoxalement aujourd’hui aucun EPR ne fonctionne. Le gouvernement indien demande et attend toujours le compte rendu de nos centrales, l’audit de l’ASN (ndlr : Autorité de sûreté nucléaire).

Vijaya Kondekar a 75 ans. Elle a fait partie des 650 personnes arrêtées par la police à la suite d'une manifestation en 2010. Village de Madban. ©Micha Patault/Picture Tank

Quelles sont les conséquences pour les populations locales ? Comment réagissent-ils ?

Ce qui m’intéresse c’est ce combat qui s’annonce entre le peuple et le gouvernement. Des propositions d’alternatives ont-elles été faites ? Non. Beaucoup de choses n’ont pas été honorées. Les populations son perdantes, d’abord sur le prix des rachats des terres. Aujourd’hui le gouvernement local estime qu’ils ont racheté les terres, mais une centaine personne seulement ont vendu à prix d’or et elles vivent à Bombay. La majorité qui vit sur place, n’est pas au courant et ne veut pas vendre. C’est une question très délicate. D’ailleurs le gouvernement essaie de monter les communautés entre elles mais ça ne marche pas. Les populations ne laisseront pas tomber parce que l’économie de la pêche est phénoménale et vitale. Beaucoup de tibétains et de népalais sont saisonniers, et viennent gagner leur vie dans cette région six mois par an. Cette centrale et ces évacuations de populations vont toucher économiquement toute la région, bien au-delà de ces cinq villages.

Mansur A.Solkar, gérant de la société AF Sea Foods. Village de Sakrinate. "L'économie de la pêche ici est ancestrale. Nous avons de très bons revenus." ©Micha Patault/Picture Tank

Les militaires ont-ils un intérêt dans la construction de ces centrales ?

Ce sujet est intéressant, c’est un pays émergent, comme le Brésil, une des plus grande démocraties, c’est un symbole. Sur le côté militaire en Inde, j’aimerai une réponse d’un spécialiste sur le versant militaire. On pourrait soupçonner qu’une centrale aussi puissante puisse générer beaucoup de plutonium nécessaire a la construction du bombes. En fait c’est du MOX et un retour possible a du détournement de plutonium. Donc on passe du civil au militaire. C’est tout aussi dangereux. Étant donné que l’Inde n’est pas signataire du traité de non prolifération nucléaire elle pourrait cacher ses activités nucléaires militaires de manière légale. Si d’énormes centrales demain couronnent l’Inde avec du MOX on peut légitimement se poser la question de l’intérêt militaire. Les pressions sont peut-être aussi à chercher de ce côté là.

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Photographies par Micha Patault / Agence Picture Tank © Tous droits réservés Vous pouvez soutenir le reportage de Micha Patault en faisant un don sur la page KKBB dédiée au projet ARE-VAH.

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Paroles de conflits: exemple de crowdfunding appliqué au journalisme http://owni.fr/2010/10/15/paroles-de-conflits-exemple-de-crowdfunding-applique-au-journalisme/ http://owni.fr/2010/10/15/paroles-de-conflits-exemple-de-crowdfunding-applique-au-journalisme/#comments Fri, 15 Oct 2010 13:11:40 +0000 Julien Goetz http://owni.fr/?p=31677 C’est quasiment une ligne droite, tout au long du 39ième parallèle, de Srebrenica à Hiroshima, un fil tendu pour recueillir des bribes de récits, raconter ce qu’est l’humain au cœur des conflits qui agitent encore (et toujours) notre continent eurasien. Raphaël Beaugrand, ex-journaliste pour lepoint.fr, en est le funambule. Perché sur son vélo, il s’est lancé le 3 mars dernier à l’assaut des 16000 kms qui séparent ces deux villes tristement célèbres pour l’atrocité de la guerre qu’elles représentent. Déjà plus de 8 mois en roue libre pour tenter de donner une mémoire au présent.

Actuellement en Chine, il roule en direction la province du Xinjiang où la minorité Ouighoure subit l’oppression du régime de Pékin depuis plusieurs années. En tout, Raphaël traversera 16 pays, dont 8 seront vraiment au cœur du webdocumentaire final “Paroles de conflits” : Bosnie-Herzégovine, Moldavie, Ukraine, Géorgie, Azerbaïdjan, Chine, Corée du Sud et Japon. Un neuvième récit était prévu en Ouzbékistan mais l’extrême tension sur place l’a finalement poussé à faire l’impasse sur ce sujet. Retour en France prévu pour Noël si tout se passe comme prévu.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le levier du crowdfunding

Avec 70 à 80 interviews par pays, des moments de vie, des instants suspendus en “no comment” et une semaine passée à vivre au plus près des populations – directement chez l’habitant – à chaque étape, la masse d’images et de témoignages que récolte actuellement Raphaël Beaugrand est impressionnante, déjà plus de 120 heures de rushs et l’aventure n’est pas terminée. Un projet gigantesque qui a besoin de moyens pour exister.

Depuis le début, Raphaël est soutenu par FatCat Films, une jeune maison de production qui, après 5 ans d’existence, se lance dans l’aventure du documentaire avec un conviction totale. La richesse de la matière récoltée sur le terrain pousse Antoine Cayrol, co-fondateur de FatCat Films, imaginer un documentaire transmédias qui pourrait se décliner à la fois sur le web (avec le soutien de mediastroika) mais aussi en version carnet de route pour supports mobiles et une version plus traditionnelle en vue d’une diffusion TV. L’envie est une chose, la réalité des finances en est une autre, d’où l’idée d’Antoine Cayrol d’utiliser le levier du crowdfunding pour aider au financement du projet.

C’est notre premier documentaire et l’on sait, par expérience, que l’on ne nous fais pas confiance comme ça, du premier coup [ndlr : dans les réseaux traditionnels de financement]. Le court-métrage, on en a fait quelques uns, maintenant je sais que l’on peut avoir des aides, des diffuseurs, parce qu’on en a déjà fait trois ou quatre qui ont marché. J’ai quand même fait les démarches pour le docu mais sans succès. Donc on a choisi de lancer la production et le tournage grâce à un peu de trésorerie que l’on avait de côté et je me suis dit :  “ceux qui vont pouvoir me faire confiance sans que l’on ai fait d’autres docus avant, ce sont les internautes”, d’où l’idée de tenter le crowdfunding.

Et cela fonctionne plutôt bien jusqu’ici. Le projet, lancé sur la plateforme KissKissBankBank depuis un peu plus de 90 jours, a déjà récolté près de 11.000 euros grâce à 134 donateurs. Les dons posés par les internautes tournent en moyenne autour de 60 euros jusqu’à un généreux mécène (resté anonyme) qui a fait un don de 1000 euros. En échange de son soutien financier, chaque “KissBanker” sera à minima crédité au générique et recevra en plus des bonus particuliers en fonction du montant soumis (du poster dédicacé au vélo de l’aventure). Mais la démarche des internaute est sans doute plus motivée par le projet en lui-même et le désir de le voir se concrétiser que par ces quelques “récompenses”.

Petites structures et projets d’envergure

La production étant déjà entamée et la première partie de cette aventure, celle du terrain, étant plus proche de sa conclusion que de son lancement, à quoi va servir ce financement ? Ce ne sont pas les postes qui manquent selon Antoine Cayrol :

Ça va déjà servir à construire l’aventure web, vu que le site devrait coûter à peu près 30.000 euros. Ça va servir également à payer tous les traducteurs, vu qu’il en faut un pour chacun des pays. Ça servira bien sûr aussi sur la post-production, principalement pour payer la monteuse qui va travailler sur le projet.

Ce que l’exemple de “Paroles de Conflits” permet de bien comprendre, c’est que ce nouvel outil de financement qu’est le crowdfunding ne signifie pas nécessairement qu’il faille se passer des réseaux habituels de la production, bien au contraire. C’est un très bon outil complémentaire pour permettre à des petites productions de prendre de l’envergure et de se permettre d’imaginer des projets plus ambitieux. Si les 18.000 euros annoncés sur KissKissBankBank pour ce projet sont atteints, ils seront également un retour sur investissement pour FatCat Films.

Le principe (pourtant logique) que la maison de production puisse récupérer une partie des frais engagés par le biais de ce financement pourrait en choquer certains mais c’est une réalité économique. Le crowdfunding permet concrètement à une petite structure comme FatCat Films de développer un projet important sans mettre en péril sa survie, ce qui n’aurait aucun sens. Bien au contraire, en venant soutenir la prise de risque initiale, les internautes offrent à la fois une réalité au projet et également une rentabilité à la structure qui le porte et qui pourrait donc être amenée à en porter d’autre du même type.

L’horizon des 18.000 euros

Tout cela se conjugue pour l’instant au conditionnel. Il reste en effet 16 jours à compter d’aujourd’hui avant la fin de l’opération de crowdfunding sur KissKissBankBank et près de 7000 euros à trouver pour atteindre l’objectif des 18000 euros. Si l’objectif n’est pas atteint au terme du délais, tous les KissBankers récupèrent leur mise et Antoine Cayrol devra repartir en quête de nouvelles pistes de financements.

Pendant ce temps, Raphaël Beaugrand continue de sillonner les routes sur la trace du 39ème parallèle, sur la trace de ces conflits qui ne sont pas si éloignés qu’on le croit et des marques qu’ils impriment dans les êtres. Ça serait dommage que ce projet ne voit pas le jour et que ces voix qui nous racontent restent muettes.

Pour aller plus loin : le projet sur KissKissBankBank, sa page FaceBook et son blog sur webdocu.fr.

http://dai.ly/aeTedV
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